La paix se construit au quotidien, pas seulement dans les discours.

Comme chaque année, la paix sera aujourd’hui au centre des attentions. Elle sera invoquée dans les lieux de culte, discutée au cours de panels et de débats, présentée comme la condition essentielle de tout progrès durable.
Cependant, les prières et les réflexions, aussi sincères soient-elles, ne suffisent pas. La paix à laquelle aspirent les Ivoiriens se construit au quotidien et commence par l’identification de tout ce qui s’y oppose.
La peur : un frein majeur à la paix
L’évangéliste Jean rappelle que les apôtres avaient verrouillé leurs portes par peur des autorités après la mort de Jésus (Jn 20, 19-23). Cette peur, aujourd’hui encore, résonne en Côte d’Ivoire.
Une grande partie de la population vit dans la peur :
peur de marcher ou de manifester librement ;
peur des agressions de “microbes” qui agissent dans l’impunité ;
peur des coupeurs de routes qui prolifèrent sur les axes interurbains ;
peur d’aller à l’hôpital faute d’assurance, sachant qu’un soin ne commence qu’après paiement préalable ;
peur, pour les exilés, de rentrer au pays de crainte d’être arrêtés pour des opinions passées.

Or, la paix ne peut coexister avec la peur.
La paix, bien plus que l’absence de guerre.
La paix n’est pas uniquement l’absence de coups de feu ou de confrontation ouverte pour la conquête du pouvoir. Elle est inexistante pour celui qui manque de pain, d’éducation, de liberté d’expression, ou pour celui qui subit l’injustice, la discrimination ou l’oppression.
Elle ne peut s’épanouir davantage là où les mécanismes institutionnels eux-mêmes créent l’inégalité et la méfiance, là où le “prince” se taille une Constitution sur mesure, là où des sièges de députés sont attribués avant même la compétition électorale, là où la commission électorale et le conseil constitutionnel restent sous contrôle direct du pouvoir, là où une minorité s’enrichit tandis que le planteur de cacao, d’hévéa ou d’anacarde vend sa récolte à un prix dérisoire,
là où la corruption, le gaspillage des fonds publics et l’impunité deviennent banals, là où la violence supplante le dialogue démocratique.
Dans de telles conditions, parler de paix relève de l’illusion. La justice et la sécurité en sont les fondements indispensables.

Pour une Côte d’Ivoire réconciliée.

Refuser de pactiser avec ces anti-valeurs est une exigence éthique et citoyenne. Vouloir la paix, ce n’est pas simplement la demander dans les prières ou la célébrer dans des discours officiels ; c’est adopter une conduite quotidienne fondée sur le respect, la justice et la solidarité. Si la Côte d’Ivoire s’engage sincèrement dans cette voie, elle pourra espérer voir se réaliser la promesse du prophète Isaïe (32, 12-18) : « L’œuvre de la justice est la paix, et le fruit de la justice, le repos et la sécurité pour toujours. »
La paix ivoirienne ne naîtra ni des slogans ni des cérémonies institutionnelles.
Elle naîtra de la justice rendue, de la sécurité assurée, des institutions crédibles, de la solidarité vécue et du refus des injustices.
Elle émergera de l’engagement de chaque citoyen à poser des actes qui honorent l’humanité de l’autre.
C’est à ce prix, et seulement à ce prix, qu’une Côte d’Ivoire véritablement pacifiée pourra voir le jour.

Jean-Claude DJEREKE

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